Dernier jour à Urisa

Vendredi 07/11, depuis le camp de base d’Urisa.

Tandis que tout le monde s’affaire à démonter le camp, les ornithologistes et herpétologistes rentrent de leur séjour aux alentours du lac Sewiki. Ils nous racontent leurs aventures. Le terrain était difficile d’accès, dominé par des lapiazs calcaires très pentus, instables et coupants. Leur séjour a été ponctué par des orages violents qui ont fait le malheur des ornithos et le bonheur des herpétos.

Antoine, spécialiste des grenouilles, a béni la pluie qui a fait apparaitre des grenouilles par centaines. Après le premier orage, il a réussi à enregistrer 17 espèces différentes en une soirée, dont plusieurs qu’il n’avait pas encore répertoriées. Il y avait aussi des espèces qui étaient présentes à Lobo, mais n’avaient pas chanté là-bas. Antoine remarque que, contrairement à Lobo, il n’y a pas eu de capture de serpent, mis à part un spécimen capturé à Urisa, et très peu de captures de lézards. Il souligne aussi l’absence de grenouilles actives durant la journée, contrairement à ce qu’il a eu l’occasion d’observer en Amazonie.

Une grenouille (Sphenophryne sp.) – Copyright : P. Gaucher / IRD

Encore une grenouille (Pseudocallulops sp.) – Copyright : P. Gaucher / IRD

Côté oiseaux, les captures ont été bonnes malgré la pluie et les difficultés du terrain. Les quatre ornithologistes ont capturé des espèces typiques des forêts de basse altitude, dont des espèces rares : un paradisier, un perroquet pygmée, des martins-chasseurs… Ils ont remarqué l’absence notable de petits passereaux de sous-bois. Christophe pense que cela pourrait être dû à l’abondance de cerfs dans les zones relativement plates, les plus accessibles pour les humains comme pour les cervidés. Les cerfs ont été introduits sur l’île de Nouvelle Guinée au milieu du 19e siècle. Comme il n’y a pas de grands prédateurs sur l’île (mis à part l’homme), ils ont proliféré et ont envahi les milieux qui leur étaient favorables, au détriment des autres espèces. Ainsi, l’île de Nouvelle-Guinée, malgré sa grande taille, est vulnérable à l’introduction d’espèces. D’une manière générale, les îles constituent des écosystèmes fragiles, et l’introduction d’une espèce pose souvent des problèmes écologiques.

Un martin chasseur (Ceyx solitarius) – Copyright : B. Mila / IRD

Un perroquet pygmée (Micropsitta pusio) – Copyright : B. Mila / IRD

L’exploration des grottes s’est poursuivie jusqu’à aujourd’hui. Les plongeurs ont dressé la topographie de deux grottes abritant des résurgences d’eau claire. Ils ont pu accéder à une faille inondée qui n’avait pas encore été visitée. Ils ont observé une faune aquatique diversifiée : des larves d’insectes, des crevettes, des écrevisses, plusieurs espèces de poissons… et aussi quelques espèces étonnantes, en particulier une tortue à nez de cochon. Ils pensent que cette vie aquatique est entretenue par les chauves-souris qui nichent dans la grotte par milliers. Elles produisent une grande quantité de guano qui tombe dans l’eau et nourrit les espèces aquatiques. Arnaud, spécialiste des insectes cavernicoles, faisait parti du groupe des explorateurs. Il est content de ses collectes lui-aussi. Il n’a trouvé aucune espèce typique du milieu cavernicole (sans yeux ni pigmentation) mais de nombreuses espèces potentiellement nouvelles.